Petit bonhomme de chemin

Jour 109

Le 18/10/11, 8:32

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Depuis quelques jours, il fait un temps exceptionnellement beau. C’est le veranillo, une sorte d’été indien qui a lieu pendant quelques semaines en octobre ou novembre. J’adore ce climat de vacances. Quel n’est donc pas mon étonnement en voyant à mon arrivée au supermarché les caissières porter des chapeaux de sorcières à l’occasion d’Halloween qui s’annonce bientôt. Cela fait une drôle d’impression...

Comme je suis pour l’instant dans une phase intello, je participe aujourd’hui encore à un séminaire. Mais cette fois, il ne s’agit pas de culture ni d’anthropologie mais d’architecture et de construction. Et oui, c’est à mes yeux un des grands intérêts de mon travail qui me pousse à m’informer sur des thèmes aussi nombreux que variés, de la préservation de l’identité culturelle andine à la construction de maisons « améliorées» (comme ce sera le cas aujourd’hui).

Etant donné que le séminaire a lieu dans le cadre Luegolandia, une exposition sur le thème de ce que sera, ou ce que devrait être, le Cusco de demain, j’en profite pour visiter les salles de l’Hôtel Cusco spécialement réaménagées à cette occasion. L’expo s’adresse en priorité aux écoliers. C’est donc tout naturellement que je me joins à un groupe scolaire pour profiter des explications de leur guide. C’est également l’occasion de voir comment se fait ici la sensibilisation environnementale auprès des plus jeunes.


Le séminaire est une fois de plus organisé par l’ONG Guaman Poma de Ayala. Décidément, je deviens complétement fan de leur action, notamment du volet du renforcement institutionnel auprès des autorités locales et organisations sociales. Comme quoi, si je ne me gêne guère pour critiquer les faux pas des ONG, je sais aussi reconnaître la valeur d'un bon travail.

La séance s’ouvre par un état des lieux du logement populaire à Cusco. L’élaboration d'habitations pour les classes moins favorisées est une question complétement négligée par les autorités qui voient la construction comme un outil de développement économique et non comme un instrument de résolution des problèmes sociaux. Au Pérou, il n’y a pas de véritable carence de logements mais le parc immobilier est de particulièrement mauvaise qualité. Dans ce domaine, les systèmes de financement promus par l’Etat ne s’adressent qu’aux classes moyennes ou aisées. En conséquence, les plus pauvres n'ont d'autre choix que de construire de leur côté avec « les moyens du bord ». En outre, dans la vallée cusquénienne, la quasi-inexistence de planification du développement urbain implique une croissance totalement désordonnée de la ville. Dès lors, la précarité des habitations n’a de cesse d’augmenter.

Ainsi, à Cusco, les populations à faible revenu économique se concentrent dans deux zones : le centre historique et les hauteurs en périphérie de la ville. Le centre historique est de plus en plus déserté par sa population traditionnelle qui y occupe des maisons insalubres qu’elle ne peut rénover en raison des nombreuses contraintes imposées pour la préservation du patrimoine culturel. L’envolée des prix des loyers dans ces quartiers très convoités par les grandes entreprises touristiques est également une raison qui pousse cette population à s’exiler à d’autres zones dans la vallée. Ainsi, la vieille ville se convertit peu à peu en une sorte de musée sans vie où seules les géants du tourisme, favorisés par la municipalité, ont voix au chapitre. En périphérie, les logements populaires se situent dans des zones particulièrement pollués, peu accessibles aux services d’approvisionnement en eau, en électricité ou de collecte des déchets. Sans parler du fait que ces habitations sont souvent construites dans des zones à risques. En effet, à Cusco, plus de 40% des logements sont situés dans des zones exposées aux risques d’inondation, de glissement de terrain ou aux risques sismiques.

Ces maisonnettes où s’entassent des familles nombreuses manquent évidemment d’intimité mais aussi bien souvent de la plupart des services de base. Peu de logements sont, par exemple, équipés de sanitaires et de système d’évacuation des eaux usées. Les habitants en sont donc réduits à faire leurs nécessités physiologiques dans des sacs en plastique.

Il est donc grand temps d’agir. Dans un contexte où la majorité des maisons sont réalisées en auto-construction, le principal obstacle auquel les classes populaires doivent faire face est le non-accès aux informations qui leur permettraient d’élaborer de meilleures habitations à base de matériaux traditionnels et peu onéreux. En outre, il faut agir au niveau des titres de propriétés des édifices et terrains à bâtir. En effet, 90% des logements populaires n’apparaissent pas dans les registres cadastraux ce qui empêche les propriétaires d’avoir accès aux prêts immobiliers tout comme aux programmes d’aide à la construction.

[ Voir les photos : Pérou - Cusco ]

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